La Lithiase Urinaire : De la Chirurgie à la Prévention

16/10/2023   Santé de l'homme   932  
Dr Alae Touzani
   La Lithiase Urinaire : De la Chirurgie à la Prévention  


Intro :

 

Le Maroc s’est progressivement doté d’un excellent plateau technique dans la prise en charge instrumentale et chirurgicale de la lithiase urinaire.
En effet, la lithotritie extra-corporelle est présente dans le Royaume depuis de nombreuses années, et de nombreuses structures sanitaires se sont équipés de matériel d’endoscopie et de générateurs LASER de dernière génération.
L’objectif de ces outils est de permettre d’atteindre un nettoyage optimal de l’appareil urinaire, tout en étant le moins invasif possible. Mais malgré cela, le risque de récidive reste élevé et pourrait toucher 1 patient sur 2.
En effet, il ne faut pas uniquement voir la pathologie lithiasique comme une maladie, mais comme un symptôme d’un déséquilibre de l’organisme que l’on doit rechercher et traiter, à froid, pour réduire ce risque de récidive. Explications

 

Quel bilan après un épisode lithiasique ?

 

A cette consultation de contrôle, qui est faite à distance de l’épisode et du traitement, nous avons déjà en principe certaines informations : le calcul a du être envoyé au laboratoire et nous avons donc l’analyse morpho-constitutionnelle et spectrophotométrique par infrarouge ou cristallographique par rayons X (l’analyse chimique est très peu fiable). Cette analyse permet de donner des informations sur la nature minérale des différentes couches du calcul, du noyau à la périphérie. Dans les cas où seuls des fragments sont parvenus au laboratoire et non le calcul intact, il sera nécessaire des récupérer les informations de reconnaissance endoscopique des papilles et du calcul (REPC) que le chirurgien a dû relever lors de l’intervention [1].

 

De plus, le clinicien réalisera un interrogatoire minutieux sur les habitudes alimentaires, la notion de maladie générale, de prise médicamenteuse, d’infection urinaire chronique, ... dans le but d’identifier des facteurs favorisant la formation de calculs.

 

Il sera également demandé au patient de réaliser un bilan sanguin et urinaire. Ce bilan sert à compléter les données de l’interrogatoire, en apportant des informations complémentaires sur l’état d’hydratation, la fonction rénale, le métabolisme phospho-calcique, le métabolisme des purines, le métabolisme glycémique, les apports protéiques, la concentration en autres molécules jouant un rôle majeur dans la lithogénèse (citrate, oxalate, magnésium), ainsi qu’une étude des cristaux présents dans les urines [2].

 

Je vous donne un exemple de l’importance de cet examen clinique et du bilan. Lors de la découverte d’une hypercalciurie, qui est le trouble le plus souvent rencontré, l’interrogatoire et l’examen physique vont permettre de préciser si elle est uniquement d’origine diététique (consommation excessive de produits laitiers, de sel, de sucre, ...), ou due à une absorption excessive de calcium au niveau du tube digestif en dehors d’un apport excessive (consommation abusive en vitamine D, hyperparathyroïdie primitive, tuberculose intestinale ou sarcoïdose, ...), ou secondaire à une résorption osseuse importante (le calcul peut être le premier signe d’une ostéoporose sévère), ou encore si elle est la conséquence d’une réabsorption tubulaire rénale diminuée (prise de diurétiques, prise de corticoïdes, ...). La liste n’est pas exhaustive, mais l’important est de savoir que le traitement du calcul n’est que la première étape du traitement de la maladie lithiasique.

 

Quelles sont les mesures hygiéno-diététiques que l’on doit adopter ?

 

Ces mesures sont valables chez les patients traités pour lithiase, mais également pour les patients sains, puisqu’elles permettent de réduire le risque de survenue d’un épisode lithiasique. Tout d’abord, il est nécessaire de boire 2 litres d’eau à pH neutre par jour (légèrement plus en période chaude), bien reparti dans le nycthémère, en insistant sur un verre d’eau avant le coucher ou si réveil nocturne. L’objectif est de produire au moins 2 litres de diurèse par jour, de densité normale.

 

Il est également nécessaire d’avoir un apport en calcium compris entre 800 et 1000 mg/j. Un apport faible entraine un risque d’hyperoxalurie et un apport important un risque d’hypercalciurie. Il ne faut pas oublier d’adapter son apport en calcium en fonction de l’eau minérale que l’on boit, certaines étant plus riche en calcium que d’autres. L’apport en sel doit être de maximum 7g par jour, au risque de voir apparaitre une hypercalciurie. Il ne faut pas oublier d’inclure dans cette quantité même le sel qui peut être caché dans certains aliments, essentiellement le pain, eaux gazeuses, céréales, fromages et charcuterie.

 

L’alimentation doit être riche en légumes et fibres, qui augmentent le pH de l’organisme, et apportent un puissant inhibiteur de la lithogénèse, le citrate, et se limiter à 50g de protéines animales par jour, soit environ 120 à 150g de viande.

 

Les apports en oxalate doivent également être limités, sans les proscrire totalement : thé concentré, fruits secs, noix, chocolat, ...

 

Avoir une activité physique est essentiel et permet de lutter contre l’obésité et le syndrome métabolique, également associés à la formation de lithiase.

 

Y a-t-il des médicaments pour éviter la survenue de calculs ou leurs récidives ?

 

Oui, mais uniquement si les mesures sont insuffisantes, ou que les troubles métaboliques sont trop importants. Les molécules sont propres à chaque trouble métabolique observé au bilan. Premier exemple, si un calcul oxalo-calcique a été traité, et qu’au bilan métabolique une hypercalciurie a été retrouvée, on va prescrire une alcalinisation au citrate pour diminuer le risque de cristallisation, voire des diurétiques thiazidiques pour baisser la calciurie. Par contre, si c’est une hyperoxalurie qui est retrouvée, on prescrira un apport en calcium ou magnésium, voire de la pyridoxine. Autre exemple, dans les cas de calcul d’acide urique, le traitement préventif repose sur le régime pauvre en purines (abats, poissons bleus, cubes pour bouillon, ...) et l’alcalinisation avec comme cible un pH > 6,5. Mais en cas de découverte d’une hyperuricémie associée, il sera indiqué de prescrire de l’allopurinol pour réduire le risque de récidive.

 

Pour conclure :

 

Considérez la lithiase comme un symptôme. L’enquête étiologique, basée sur l’examen clinique et le bilan sanguin et urinaire, est la clé pour réduire le risque de récidive. Si cette prise en charge permet de corriger et prévenir un problème diététique dans 80 % des cas, elle pourra aussi dépister des troubles plus profonds, métaboliques, hormonaux voire génétiques.

 

[1] Touzani, A., et al. « Reconnaissance endoscopique des anomalies papillaires et des calculs urinaires (REPC): comment et quel intérêt?. » Progrès en Urologie 32.13 (2022): 893-898.

[2] Almeras C., et al. « Recommandations de bonnes pratiques sur la prise en charge des calculs et de la lithiase urinaire : diagnostic, traitement, suivi et prévention secondaire » Accessible sur : https://www.urofrance.org/wp-content/uploads/2022/11/20221114_Reco-CLAFU_argumentaire_FINALE.pdf


Envoyer à un ami
sms viber whatsapp facebook

Découvrez notre application
pour une meilleure expérience !
Google Play
App Store
Huawei AppGallery